Identification et description
Nom du jardin Parc du Domaine de Ronchinne
Nom ancien Château de Ronchinne
Date de création vers 1911; vers 1933 (jardin de roches)
Province Namur
Arrondissement Namur
Commune Assesse
Auteur/ Créateur Jules Buyssens (1872-1958), horticulteur, paysagiste à Bruxelles, vers 1911
Coordonnées Ronchinne5330, Maillen
Localisation Latitude : 50.35575
Longitude : 4.92989

Historique

Aménagé au nord du bois de Ronchinne, le complexe du même nom comprend deux ensembles. Le premier ou « vieux château » est un complexe constitué à partir d'un donjon médiéval agrandi aux cours des XVIe et XVIIe siècles pour former un U partiellement entouré d'eau et d'une ferme au sud-ouest cantonnée de tours circulaires. Le château et la ferme ont fait l'objet de nombreuses transformations au XIXe et au XXe siècles. Le second ensemble est formé par le « château Napoléon » construit à la fin du XIXe siècle et par ses nombreuses dépendances. Le Prince Victor Napoléon achète le domaine où il s'installe officiellement le 15 juin 1912 avec son épouse la Princesse Clémentine de Belgique, fille du Roi Léopold II, et leur fille Marie-Clotilde née l'année précédente. Toutefois, dès 1911, sont aménagés les écuries et le jardin qui deviendra le domaine de prédilection de la Princesse. Le château, bien que de construction récente, nécessite d'importants travaux pour y installer le chef de la Maison impériale française. Le bâtiment est sensiblement transformé et son mobilier entièrement renouvelé. Dans le parc, de grands travaux d'abattage et de replantation sont entrepris en 1920 suivant un plan dressé par l'architecte paysagiste bruxellois Jules Buyssens, grand défenseur du Nouveau jardin pittoresque. Dès cette époque et sur sa demande, la Princesse dispose d'une serre ainsi que d'un potager-fruitier. Parmi les fleurs, ses préférences vont aux roses, aux rhododendrons et aux azalées (PAOLI D., p. 179) qu'elle fait planter en grand nombre. Le domaine comprend également à l'ouest un grand jardin fleuriste centré sur un bassin circulaire et une roseraie axée sur la façade du château. A l'est, le long versant boisé est dégagé en contrebas du château afin de créer une large perspective enherbée dévalant la pente, traversés en son milieu par un « ruisseau alpin ». Sur les côtés, les masses boisées sont sillonnées de longs chemins de promenade. Aux début des années 1930, suite à une mauvaise gestion des régisseurs successifs et aux retombées du krasch boursier, certains parterres de fleurs sont remplacés par des plantations de légumes ou de fruits, les serres sont fermées et le cheptel est vendu. La Princesse, qui réside de plus en plus à Ronchinne, travaille personnellement dans son jardin. Au printemps 1933, elle-même et son fils Louis, « se consacrent à l'embellissement du jardin de rocaille grâce aux plantes rapportées des Alpes par le jeune prince » (PAOLI D., p. 205). L'aménagement du vaste parc tire parti du caractère et du relief particuliers du site. Le grand coteau pentu, qui dévale au pied du château, est magnifié par un ensemble paysager dont les masses plantées confortent la position dominante de l'édifice. Une grande promenade périphérique, circulant à travers les sous-bois, ouvre des perspectives variées sur le coeur du parc. En partie basse de cette zone paysagère, un miroir d'eau occupe le pied du versant gazonné. Au coeur de celui-ci, apparaît une étonnante composition de faux enrochements - dont l'imitation est particulièrement réussie - à l'intérieur desquels sinue un filet d'eau : le « ruisseau alpin ». De tels aménagements, en vogue au début du XXe siècle, ont rarement subsisté au-delà des années 1960. En contrebas de l'ancienne roseraie demeure un autre témoin de ce même esprit de composition sous la forme d'un jardin de roches constitué de lourds blocs de calcaire, et au pied duquel se loge un bassin en béton. Cet ensemble minéral est aujourd'hui presque totalement privé de son décor végétal. A proximité, se découvre un élégant pavillon accompagné d'un canal d'eau et d'un petit bassin conçus dans le style Arts and Crafts, où les matériaux sont des briques de petit format et des dalles de pierre calcaire aux formes naturelles. La partie la plus élevée du domaine conserve les structures principales (petits escaliers et bassins) de trois jardins réguliers : le jardin enclos dit de l'Orangerie, l'emprise du grand potager-fruitier désaffecté.

Description

Éléments architecturaux : A l'entrée sud du domaine, en bordure de la route de Mont à Crupet, conciergerie en moellons de grès sous une toiture d'ardoise à quatre versants interrompus par des lucarnes et égout débordant. Sur la droite, grille en fonte encadrée par des murs en moellons en quart de cercle, respectivement cantonnés de deux piliers carrés à bossages. En limite nord des prairies situées à l'est du château, deux petites constructions similaires en moellons de grès apparaissent sous une haie de conifères. Implantées parallèlement, à quelques trente mètres de distance, elles présentent une façade percée d'une porte et de deux petites baies à encadrement calcaire abritées sous le long pan débordant de la toiture. Elles étaient destinées à l'abri de faisans et de petit gibier. Dans le petit vallon à l'ouest du château, à la suite du bassin à décor de rocaille, jolie scène constituée autour d'un pavillon en brique de plan carré doté d'un péristyle extérieur et couvert d'une ample toiture à quatre pans, débordante. Un plancher en fin lattage court sous le péristyle dont les piliers en briques carrés supportent la charpente de la toiture. Dans l'axe de la porte d'entrée, petit canal d'eau serti dans un bandeau dallé s'élargissant en sa partie centrale pour accueillir un bassin quadrilobé. La tête du canal est formée par un bassin de fontaine adossé à un muret en moellons calcaires fortement dégradé et laissant apparaître, à plusieurs endroits, sa fondation en béton. Au nord-est du château, complexe de dépendances disposées de part et d'autre d'un jardin enclos. En partie haute, long bâtiment en moellons de grès - dénommé orangerie - percé d'un large porche fermé par un lourd portail de bois ouvragé. Dans le porche, fonts baptismaux (rapportés) en pierre calcaire, dont la cuve circulaire est sculptée de visages humains. Côté jardin, la façade est rehaussée à l'étage de plusieurs petits balcons avec garde-corps en fer forgé et, au rez-de-chaussée, de niches occupées par de hauts vases. En contrebas du jardin, volumes de dépendances (ancienne maison du jardinier) dissimulés derrière le mur de clôture et de hautes haies d'if taillées accompagnant un passage en chicane.

Éléments végétaux : Dans les deux coteaux plantés qui encadrent la longue prairie descendant vers le grand étang inférieur, on distingue parmi les feuillus un très bel ensemble d'érable du Japon (Acer palmatum) dont un exemplaire pourpre (Acer palmatum 'Atropurpureum'), des chênes d'Amérique (Quercus rubra), un groupe de hêtre pourpre (Fagus sylvatica 'Atropurpurea') ainsi que quelques magnolias (Magnolia x soulangiana) et de généreux massifs de rhododendron (Rhododendron hybride) en partie haute (au sud-est). Dans le dernier tiers inférieur, plantations serrées d'épicéa. Derrière ceux-ci, épais sous-bois de feuillus où apparaissent des séquences irrégulières d'if (Taxus baccata) en bordure de certains chemins de promenade. En regard de la façade du château, au-delà de la route, domine un grand robinier tortueux (Robinia pseudoacacia 'Tortuosa'). Celui-ci marque le passage vers un jardin de roches dont les derniers témoins sont un haut cyprès (Chamaecyparis pisifera 'Filifera') et un thuya de Lobb (Thuja plicata 'Variegata'). En contrehaut de ce jardin, un massif de rhododendron (Rhododendron hybride) accompagne le chemin menant vers le complexe de dépendances.

Potager : Etabli en partie haute du domaine au nord-est du château, l'ancien potager-fruitier forme un grand rectangle aujourd'hui entièrement gazonné et fermé sur deux côtés par une longue haie de charme. Il était jadis complété d'un complexe de serres et de couches tandis qu'au nord se développait un jardin fleuriste.

L'eau : Entièrement dissimulé sous un couvert d'épicéa - ajouté après la Seconde Guerre - un « ruisseau alpin » utilisait la pente naturelle du terrain, sinuant sur tout son parcours dans une goulotte en béton cachée par un étonnant décor pittoresque. Entièrement artificiel, celui-ci est réalisé à partir de structures en béton ferraillé assemblées de manière à donner l'illusion d'affleurements rocheux. Malgré les dégradations qui laissent apparaître par endroits la technique d'exécution, l'écoulement d'eau est toujours assuré par une source. A cet endroit, une petite aire de repos aménagée à flanc de coteau, offre deux petits bancs encadrant un bassin, adossés à un mur courbe en moellons de grès raidis de pilastres. L'écoulement rejoint en aval une première surface d'eau dont les berges sont envahies de végétation des lieux humides. La partie basse du parc est occupée par un plan d'eau aux contours souples, à parois de béton. Dans le jardin de roches, une poche d'eau en béton lissé intègre des cuvettes de plantations logées dans un décor très minéral constitué d'imposants blocs de roche calcaire posés à sec et de dalles de calcaire affleurant le plan d'eau pour former un pas japonais. En partie haute du domaine (au nord-est), au centre de l'ancien jardin fleuriste aujourd'hui transformé en aire de jeux pour enfants, un grand bassin circulaire cerné d'une large margelle en calcaire inclut quatre socles carrés destinés à recevoir des végétaux en pot. Un dernier bassin de plan carré à pans coupés et margelle moulurée marque le centre du jardin dit de l'Orangerie.

État de conservation : L'importance du domaine et sa réaffectation en centre de loisirs depuis 1957, justifient l'état actuel du parc et de ses principaux éléments architecturaux et décoratifs : en partie haute, le potager-fruitier est transformé en surface gazonnée mais conserve une serre à vignes adossée, le jardin fleuriste au nord et la roseraie établie en regard du château ont entièrement disparu, les jardins réguliers (jardin dit de l'Orangerie et jardin contigu conservant un grand bassin) ont perdu la majeure partie de leur accompagnement végétal. Dans le jardin de roches, le bon assemblage d'importants blocs de pierre a permis de garantir la conservation des structures bien que les écoulements d'eau ne sont plus assurés et que toutes les plantes alpines et sous arbrisseaux qui soulignaient les différents niveaux du jardin ont disparu. Le pavillon carré à péristyle, tout proche, a fait l'objet d'une restauration en 1992-1993 qui a amené le remplacement de ses supports de bois par des piliers en briques. Bien que vandalisé à plusieurs reprises, il forme néanmoins une jolie scène avec son petit canal d'eau axial. Dans le grand parc paysager en contrebas du château, le « ruisseau alpin » laisse aujourd'hui apparaître, en de nombreux endroits, le caractère artificiel de ses enrochements. La présence de plantations serrées d'épicéa tout le long de son parcours dépare malheureusement la scène. Le long des promenades latérales, les nombreux ouvrages d'adduction d'eau originaux conservés (collecteurs, caniveaux, rigoles d'écoulement) témoignent de l'intérêt que les commanditaires ont porté au bon écoulement des eaux de surface et au drainage des sols.

Maintenance : Dès avant la Seconde Guerre, les soins nécessaires à l'entretien du grand jardin fleuriste ne peuvent plus être assumés. Plusieurs jardins du domaine réclamaient des attentions exigeantes et régulières qui ne sont plus envisageables aujourd'hui. La simplfication des aménagements et les restrictions dans la maintenance imposées par la nouvelle affectation du domaine ne permettent pas d'apprécier la richesse des grands jardins fleuris et la diversité des scènes pittoresques mises en place. Des travaux d'entretien minimum sont menés sur l'ensemble de la propriété, de manière à offrir un cadre agréable aux agents de poste qui y sont accueillis en villégiature. Un soin particulier est notamment réservé à la taille des longues haies de charme.

Documents iconographiques

Plan du parc de Ronchinne. Plan aquarellé par E. Galoppin, daté 1912 (coll. Gilbert Gallet). Cliché G. Focant © Service Public de Wallonie (SWP)

Perspective vers le château au sommet du coteau aménagé. Cliché G. Focant © Service Public de Wallonie (SWP)

Vestiges des enrochements artificiels du "ruisseau alpin" dévalant le coteau. Cliché G. Focant © Service Public de Wallonie (SWP)

Pavillon à péristyle et canal d'eau en contrebas du jardin fleuriste. Cliché G. Focant © Service Public de Wallonie (SWP)

Plan des transformations des abords du château dressé et exécuté par Jules Buyssens. Dessin aquarellé (coll. Gilbert Gallet). Cliché G. Focant © Service Public de Wallonie (SWP)

Cartographie

Carte chorographique des Pays-Bas autrichiens du Comte de Ferraris (1771-1777) : 117/4, 137/3

Carte topographique 1.20.000e (Dépôt de la Guerre) : 53/4 (Yvoir) Impr. coul. 1933

Carte topographique 1.10.000e (Institut Géographique National) : 53/4

Orthophotoplan 1.10.000e (Service Public de Wallonie) : 53/4/2

Autre(s) source(s) cartographique(s) :
Domaine de Ronchinne appartenant à S.A.I. La Princesse Napoléon. Plan des transformations des abords du château dressé et exécuté par Jules Buyssens, Architecte paysagiste à Bruxelles. Plan en couleurs, n.d. [vers 1911] (Fondation Jules Buyssens).

Iconographie

Autre(s) source(s) iconographique(s) :
Vallée de la Meuse. Château de Ronchinne à Mont Godinne (vue de la façade arrière du château avant l'aménagment du parc). Carte postale, éd. Nels, Bruxelles, série 7 n° 181, cachet postal 1908 [vers 1900].
Château de Ronchinne. Propriété de L.L.A.A.R.R. le Prince et la Princesse Napoléon (vue de la façade du château avant l'aménagement de la cour). Carte postale, éd. Nels, Bruxelles, série 51 n°26, cachet postal 1913 [vers 1900].
Centre de vacances. Ronchinne. Série de cartes postales, éd. Est-Ouest, Bruxelles, vers 1960 (coll. Ed. Sacré, Courrière).

Bibliographie

BAUDOUIN Jean-Claude et de SPOELBERCH Philippe, Arbres de Belgique. Inventaire dendrologique 1987-1992, s.l., 1992, p. 457.

DE SAUMERY Pierre-Lambert, Les délices du Païs de Liège, Liège, 1738-1744, t. IV, p. 429-430.

Le patrimoine monumental de la Belgique Wallonie, Liège, P. Mardaga, 1972 à 1997, vol. 5, t. 1, p. 391-392.

PAOLI D., Clémentine Princesse Napoléon 1872-1955, Louvain-la-Neuve, Duculot, 1992.

SACRE E., Ronchinne, 1988.

Informations administratives

Intitulé du classement : Site

Éléments classés : alentours du château

Arrêté : 1988-09-13

Publié : oui

Superficie : 20 hectares

Informations complémentaires

Auteur du formulaire : Serge Delsemme / Nathalie de Harlez de Deulin

Date de création de la notice : 2000-01-24

Caractéristiques du parc/jardin

Statut du jardin : privé

Accueil du public : fermé au public

Classement : Site, Monument

Type de jardin : Nouveau jardin pittoresque