Identification et description | |
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Nom du jardin | Parc du Château de Dave |
Date de création | début du XVIIIe siècle; vers 1860; 1910 |
Province | Namur |
Arrondissement | Namur |
Commune | Namur |
Auteur/ Créateur | Eugène Bühler, horticulteur, paysagiste français (vers 1860) |
Auteur/ Créateur | Denis Bühler, pépiniériste, paysagiste français (vers 1860) |
Coordonnées | Rue du Château, 545100, Dave |
Localisation | Latitude : 50.413148 |
Longitude : 4.887172899999996 |
La Terre de Dave est une des plus anciennes du comté de Namur et une des plus prestigieuses, possédant des droits et servitudes sur Andoy, Limoy, Mozet, Goyet, Jauche, Arville et Wierde. Dès le XIIe siècle, le site idéalement situé en bord de Meuse comprend une tour parfois désignée sous l'appellation « Vie maison » (vieille maison). Cette tour est agrandie une première fois au siècle suivant par Warnier II de Dave, puis une seconde fois à la fin du XVIe siècle suite à l'occupation et à l'incendie du château subis lors du célèbre siège de la ville de Namur en 1692. Le domaine, remis en état par Marie-Thérèse de Ligne d'Arenberg, comprend un petit manoir rectangulaire en briques rouges cerné de douves défendues par deux ponts levis. Face au château se trouvent des dépendances de même longueur abritant écuries, remises et logements d'officiers de maisons et, à l'étage, des appartements. Un jardin magnifique accompagne cet ensemble, occupant toute la partie nord de la propriété comprise entre la route de Jambes et la Meuse. P.-L. de Saumery qui les visite peu avant 1740, leur accorde une de ses plus longues descriptions et, sans conteste, une des plus élogieuses. Le vestibule du château communique, au-delà des douves, avec une terrasse ornée de tablettes et de bancs de marbre, bordée d'une ballustrade et conduisant à un « Cabinet bâti dans le goût oriental », tandis qu'une charmille règne tout au long de la rivière. La cour du château, engazonnée, est embellie de deux bassins de fontaine en ligne entre lesquels est placé un cadran solaire en métal doré sur piédestal. Les murs de la cour sont ouverts par deux grilles : la première donne sur un bosquet planté dans la prairie (au sud) tandis que la seconde est l'entrée du jardin d'agrément « où commence une Alée de Charmille artistement taillée et d'une extrême hauteur, qui n'étant coupée que par le Jardin potager (...) est continuée jusqu'à un Pavillon à trois Portiques, dont la maçonnerie est couverte de Charmilles taillées en Pilastres, Piédestaux, Corniches, Festons, et d'autres ouvrages imitant ceux de l'architecture ». Une seconde allée, perpendiculaire, traverse le jardin comparti en quatre carrés. Elle aboutit à « un Téatre en coquillage, couvert d'une Voute ornée de peintures, ouvert par trois Arcades de face, et élevé sur une Voute ouverte aussi par une Arcade à demi-cintre, où l'on a ménagé une Grote en rocaille et coquillage, embélie de plusieurs Fontaines et Jets d'eau (...) Le Centre de ses deux Alées est occupé par un Bassin octogone de soixante dix piés de circonférence, revêtu d'un Mur de pierre couvert de Tablétes de Marbre brute (...) Les deux Alées coupées en quatre par ce Bassin sont ornées de huit Bustes à deux faces sur des Piédestaux placés dans les angles, entre lesquels sont quatre Cabinets de Charmille de figure exactement quarrée » (DE SAUMERY Pierre-Lambert, Les délices du Païs de Liège, Liège, 1740). Les grands carrés de ce jardin sont encore ornés de figures d'homme sur piédestal représentant les Saisons et de plates-bandes fleuries. D'autres carrés renferment respectivement un potager, un labyrinthe agrémenté d'un cabinet et de bancs, et une étoile formée de seize allées dont le centre est occupé par un bassin de fontaine protégé sous l'ombrage de seize arbres plantés en bouquet. Une allée de haute futaie, délimitant le jardin au nord et à l'est, double les palissades de charme latérales, intégrant dans les angles deux cabinets de verdure où apparaissent les figures du Jour et de la Nuit. Du côté de la rivière, un mur bas de charmille s'ouvre sur les trois allées du jardin. Ce somptueux jardin, qui devait nécessiter des soins considérables, est maintenu durant plus d'un siècle. On ignore toutefois quel était son état d'entretien au début du XIXe siècle. A partir de 1856 et jusqu'en 1892, le château fait l'objet d'agrandissements successifs pour prendre son aspect actuel : allongement du corps de logis, adjonction d'une tour carrée à crénaux et de deux tourelles en façade et enfin d'une annexe vers le sud. Parallèlement, vers 1860, toute trace du jardin est éliminée pour mettre en place une longue composition paysagère. Celle-ci est l'oeuvre des frères Denis et Eugène Bühler, dessinateurs de parcs et jardins et pépiniéristes installés à Paris en 1840, alors occupés à l'aménagement du parc de la Tête-d'Or à Lyon. La conception du parc de Dave est représentative de la manière de composer des frères Bühler, très appréciée par la bourgeoisie française de l'époque. On y reconnait l'utilisation de longues promenades en boucle ceinturant d'importantes surfaces gazonnées rehaussées de bouquets d'arbres apparaissant clairement au fil de la promenade. Parmi ceux-ci, se distinguent notamment les hautes cîmes de plusieurs wellingtonias et de sapins d'Espagne, deux essences fréquemment rencontrées dans les compositions des Bülher. Si les plantations arbustives sont ici peu représentées – certaines ont probablement disparu – on distingue toutefois deux îlots constitués d'essence à fleurs accompagnées de massifs de symphorine. Les abords du château sont libres de toute plantation ; seule une haie taillée cerne le soubassement du bâtiment depuis lequel s'ouvrent de très longues perspectives sur la Meuse et sur l'île de Dave. Etabli sur un terrain étiré, entre le pied d'un coteau et les berges du fleuve, le dessin du parc tire néanmoins élégament parti de cette situatoin difficile, en privilégiant les contrastes entre les zones densément plantées et ombragées et des espaces laissés libres exposés en pleine lumière.
Éléments architecturaux : A l'entrée de la propriété, longues dépendances de la première moitié du XVIIIe siècle en briques et pierre bleue, divisées en neuf travées par des pilastres toscans d'ordre colossal abritant des remises à voitures cantonnées d'écuries. A l'étage, fenêtres à croisée sous un haut entablement à gouttes et bâtière d'ardoise à croupes et coyau dont la corniche est soulignée d'une frise décorative. Parallèle à cet ensemble, logis du régisseur, bâtiment à double corps de trois travées en briques peintes sous toiture à la Mansart, agrandi au XIXe siècle. Sous les frondaisons de deux hauts platanes, maisonnette en bois à usage de cabine de bain, constituée de panneaux à lattes décoratifs sous une toiture à deux versants. En bord de Meuse, à la suite de deux groupes d'orme, long embarcadère en pierre calcaire. L'ouvrage, d'une certaine ampleur, inclut plusieurs emmarchements et une élégante terrasse-belvédère bordée de panneaux décoratifs en fer forgé rehaussés de l'écu aux armes de Fernan-Nunez surmontées de la couronne ducale. A l'extrémité nord de la propriété, petite habitation en briques et pierre calcaire sous une haute toiture en pavillon. Contiguë, porte monumentale en briques raidie de chaînages d'angle et fermée d'une grille. L'édicule est coiffé de consoles en briques destinées à supporter des vases. Sur la gauche, un mur de pierre surmonté de brique rejoint le bord de Meuse.
Éléments végétaux : Fermant le parc sur deux côtés, longue allée simple de tilleul à grandes feuilles (Tilia platyphyllos) plantée en L, incomplète dans l'angle nord-est. Campés en bord de Meuse, dans l'axe du château, deux groupes de trois ormes (Ulmus glabra 'Exoniensis') de taille exceptionnelle et rares survivants à la maladie de la graphiose. En regard de la tour carrée du château, un sophora pleureur (Sophora japonica 'Pendula') au port particulièrement équilibré. Parmi l'important patrimoine végétal présent sur le site, on remarque notamment un magnifique frêne doré (Fraxinus excelsior 'Jaspidea') compris entre deux exceptionnels sapins d'Espagne (Apies pinsapo), deux wellingtonias (Sequoiadendron giganteum) et un hêtre à feuilles laciniées (Fagus sylvatica 'Heterophylla'), tous localisés à l'extrémité nord du parc. Revenant vers le château, près d'une cabine de bain, un haut ptérocaryer (Ptérocarya fraxinifolia). A proximité de l'embarcadère, un chêne fastigié (Quercus fastigiata) et un haut sophora (Sophora japonica) sur la berge. Près des dépendances, deux grands mélèzes (Larix decidua). La plupart de ces grands sujets s'intègrent dans des îlots plantés contemporains, révélant un dispositif paysager particulièrement bien maîtrisé.
Potager : En regard du logis du régisseur, longs rectangles de culture ceinturés de haies, respectivement réservés à la production des légumes et à la multiplication d'arbres et d'arbustes de collection.
Éléments remarquables : Le long du mur d'enceinte à l'est, exceptionnel pavillon de jardin en briques construit en 1710 à la manière d'un théâtre de coquillages, en tant qu'élément de décor principal et axial d'un jardin régulier. Elevé sur deux niveaux avec escaliers latéraux, il présente une façade largement ouverte par trois arcades, couverte de rocailles avec écoinçons et intrados de l'arc principal en mosaïque mêlant galets, coquillages, coquilles de moules et d'escargots, machefer, etc. La salle inférieure abrite un bassin de fontaine sous voûte couverte d'un décor de galets et d'éclats de laitier pris dans un enduit épais. Les murs et la voûte de la pièce supérieure sont peints en trompe l'oeil figurant piliers, consoles, caissons de voûte et, sur les murs latéraux, un garde-corps rythmé d'arbres en pots. Le pavillon est coiffé d'une toiture de tuiles à pans, cachée derrière un fronton chantourné en briques sur lequel subsiste les restes d'un enduit clair et des éléments d'ancrage métallique alors que tout le décor peint a disparu.
État de conservation : Du prestigieux jardin du début du XVIIIe siècle, dont la plus belle partie occupait tout le terrain compris au nord du château, le seul témoin en place est le singulier pavillon de 1710. Son étonnant décor a malheureusement disparu dans sa plus grande partie, tant les peintures murales en trompe l'oeil de la salle principale que les nombreux matériaux appliqués dans les enduits de la façade et de la voûte couvrant le bassin de fontaine. Malgré ces dégradations, les éléments subsistants permettent de rendre compte de l'originalité et de la qualité des matériaux mis en oeuvre. L'allée de tilleul qui s'interrompt devant le pavillon a été replantée en 1910. Elle occupe très probablement un des axes du jardin ancien. A l'exception de ces deux éléments, l'ensemble du parc atteste clairement des intentions paysagères des frères Bühler, mises en exécution vers 1860. Toutefois, certains bouquets, corbeilles et plates-bandes fleuries qui venaient rehausser l'ensemble paysager ainsi que certaines plantations arbustives placées en sous-étage des grands arbres ont aujourd'hui disparu.
Maintenance : La plus grande partie du parc est entretenue avec soins et une attention particulière est réservée au maintien en bonne santé des grands arbres. Le circuit des promenades et la distribution des groupes d'arbres sont conservés suivant le plan d'aménagement de 1860. Depuis une trentaine d'années, le régisseur du domaine s'attache à compléter l'extrémité sud du parc par de nouvelles plantations de collection.
Carte chorographique des Pays-Bas autrichiens du Comte de Ferraris (1771-1777) : 117/2
Carte topographique 1.20.000e (Dépôt de la Guerre) : 47/8 (Naninne) Impr. coul. 1907
Carte topographique 1.10.000e (Institut Géographique National) : 47/8
Orthophotoplan 1.10.000e (Service Public de Wallonie) : 47/8/3
Autre(s) source(s) cartographique(s) :
Plan du parc avec identification des arbres. Levé par Etienne Nève de Mévergnies,
mesures effectuées en août 1992.
Autre(s) source(s) iconographique(s) :
Vue du château de Dave prise dans la cour, à la Meuse, Comté de Namur. Dessin à l'encre
par R. Leloup, vers 1738. In : Les délices du pays de Liège. Fac-similé des dessins complémentaires et restés inédits
de Remacle Leloup, Liège, [1903].
Vue du château de Dave à la Meuse, Comté de Namur. Dessin à l'encre par R. Leloup,
vers 1738. In : Dessins inédits de Remacle Leloup, [1903].
Vue du château et de l'église de Dave en 1740. Gravure In : « Het Verheerlijkt Nederland
of kabinet van hedendaagsche gezigten van Steden, Dorpen, Sloten (...) », II, n° 120,
Amsterdam, I. Thirion, 1745.
Vue des environs de Dave. Dessin au crayon repris à la plume, lavis sépia et mine
de plomb du Général de Howen, 19 juillet 1820. In : BASTIN Nestor & DULIERE C., Namur et sa province dans l’oeuvre du général de Howen (1817-1830), Crédit Communal de Belgique, s.l., 1983 (Histoire, 11), p. 221; ill. 162.
Le château de Dave. Dessin de P. Lauters. In : VAN HASSELT Alphonse, Voyage aux bords de la Meuse. Légendes, récits et traditions. Dessins de Paul Lauters, Bruxelles, Société des Beaux-Arts, 1839, n° 18.
Château de Dave. Lithographie In : VASSE Abraham-Jacques, La province de Namur pittoresque ou vues des châteaux, des sites pittoresques, des
ruines et des monuments de la province, dessinées d’après nature. Lithographiées par
Lauters, Fourmois, Ghémar, Kindermans, Bruxelles-Paris, [1844].
Dave. Namur. Lithographie. In : DE DAMSEAUX Emile, La Belgique pittoresque. Les châteaux, Mons, 1872-1878, 4 vol., 1872-1873, vol. 1.
BAUDOUIN Jean-Claude et de SPOELBERCH Philippe, Arbres de Belgique. Inventaire dendrologique 1987-1992, s.l., 1992, p. 460-461.
DE DAMSEAUX Emile, La Belgique pittoresque. Les châteaux, Mons, 1872-1878, vol. 1, non paginé.
DE GROOTE Christine, Le guide des jardins de Belgique, Bruxelles, éd Racine, 1995, p. 192-193.
DE HARLEZ DE DEULIN Nathalie, Les parcs et jardins historiques de Wallonie In : BAUDOUX Laurence & GIRY-DELOISON Charles, Le jardin dans les anciens Pays-Bas, Arras, Artois Presses Université, 2002, p. 316-317.
DE SAUMERY Pierre-Lambert, Les délices du Païs de Liège, Liège, 1740, t. 2, p. 213-219.
DE THOMAZ C., « Parc du château de Dave », Dendrologie belge (Annales de la Société belge de Dendrologie), 1996, p. 141-142.
HUART Fr., « Le château de Dave et ses transformations du XIe siècle à nos jours », La Maison d'Hier et d'Aujourd'hui, n°24, déc. 1974, p. 66 et suiv.
LANOTTE A., « Remacle Leloup, en 1738, s'arrête à Dave et dessine un château: huit siècles d'histoire », Pays de Dave, n° 99, juin 1996, p. 1-32.
Le patrimoine monumental de la Belgique Wallonie, Liège, P. Mardaga, 1972 à 1997, vol. 5, t. 1, p. 152-153.
NEVE DE MEVERGNIES Et., « Histoire de la seigneurie de Dave », Pays de Dave, en 14 parties, oct. 1984 (n° 54) à janv. 1989 (n° 71) et 1993 (révision et compléments).
NOURRY L.-M., « Denis Bühler (1811-1890) et Eugène Bühler (1822-1907) » In : RACINE Michel, Créateurs de jardins et de paysages en France de la renaissance au XXIe siècle, Actes Sud, 2002, t. II, p. 35-38.
WOLFF James, Essai de restitution d'un jardin du XVIIIe siècle, Travail de fin d'études à l'Institut Supérieur d'Architecture Lambert Lombard, site de Liège, 2001-2002.
Intitulé du classement : Site
Éléments classés : parc
Arrêté : 1977-03-04
Mérite le classement pour : le pavillon de 1710 comme Monument
Publié : oui
Superficie : 7 hectares 27 centiares
Auteur du formulaire : Serge Delsemme / Nathalie de Harlez de Deulin
Date de création de la notice : 2000-05-03
Statut du jardin : privé
Accueil du public : fermé au public
Classement : Site
Type de jardin : À la française